Les canards de la ferme.

Les canards partent à la pointe de l'aube, dès le premier chant du coq, alors que la ferme, barbouillée d'un brouillard sec et froid, garde encore sa figure grise de malade. L'oeil pétillant de malice, traînant leur panse longue et creuse dans l'herbe humide de rosée, la plume déjà gonflée à la pensée de l'eau, ils dévalent le clos, d'une patte sur l'autre, faisant zigzaguer leurs queues avec un ensemble parfait. Ils ont leurs coulées, dans le pied de la haie du fond. Apeurés soudain, cou bas et bec tendu, ils se faufilent, chacun par son trou, les jeunes à la suite de la vieille cane.

De l'autre côté, en bordure de l'herbage, sous les hêtres, la mare les attend, basse, pareille à une patinoire de jais avec son eau noire et glacée. Pendant que le gros de la troupe reste à jaser sur le bord, les trois mâles prennent l'eau; l'un après l'autre. Ils poussent vigoureusement jusqu'au milieu, font une volte-face et s'immobilisent sur l'eau sombre comme trois étoiles dans le ciel nocturne. Entre leurs compagnons, toujours sur le bord, et eux, de longues palabres s'établissent, où il est question de l'eau qu'on ne trouverait pas meilleure dans les mares de Saint-Roch, pas même à l'abreuvoir de la commune. Enfin, la vieille cane de Barbarie, à trogne rouge et boutonneuse, s'en vient, avec des mouvements délicats du derrière, tâter si l'eau est convenable à ses douleurs. Les jeunes, impatients, se précipitent à sa suite.

Les jeux commencent: plongeons, glissades et bascules. Ils se poursuivent jusqu'au soir, entrecoupés d'une courte sieste qui se prolonge les jours de pluie. Virant, tournoyant, piquant du bec, battant l'eau transparente de leurs palmes jaunes, claquant des ailes, criant du nez leur joie sauvage, ils font entendre jusqu'à la maison, un joyeux vacarme. L'eau roule sur leurs plumes et des chapelets de perles glissent le long de leurs ailes filantes et bleues.

Au crépuscule, ils se réunissent pour se concerter. Le plus vieux des mâles prend la tête. les autres se rangent par derrière en triangle, dans un ordre impeccable, têtes droites, dressant leurs becs de cuivre jaune, dodelinant leurs ventres rebondis; la bande: canards, canes, canetons, la haie franchie, débouche du talus en fanfare. Ils viennent se ranger sous l'escalier, loin du poulailler.

Tard dans la nuit, on les entend palabrer, jusqu'à ce que l'ombre et les torpeurs de la digestion éteignent leurs voix, une à une.

d'après Augustin R.Robinet

Le Haut-Lieu

Ed. Denoël

1. Barre ce qui n'est pas dans le texte.

un brouillard gris et humide

un brouillard épais et glacé

un brouillard sec et froid

A l'aide de ton dictionnaire, complète les expressions suivantes avec les adjectifs brûlant ou glacé.

le blizzard est un vent _______________________

le sirocco est un vent ________________________

2. Où se trouve la mare ?

en ________________________________________________________ , sous _________________________________________

3. A quoi compare-t-on les trois canards sur la mare ?

à _____________________________________________________ dans _______________________________________________

4. Rétablis la ponctuation dans les phrases suivantes :

Les jeux commencent plongeons glissades et bascules

Virant tournoyant piquant du bec battant l'eau transparente de leurs palmes jaunes claquant des ailes criant du nez leur joie sauvage ils font entendre jusqu'à la maison un joyeux vacarme.

5. Dessine un canard devant la phrase du texte.

Ils viennent se ranger sous l'escalier, près du poulailler.

Ils viennent se placer sous l'escalier, loin du poulailler.

Ils viennent se ranger sous l'escalier, loin du poulailler.

6. A quel moment de la journée les canards partent-ils ?

 


A quel moment rentrent-ils ?

 


7. Place les canards rentrant à la maison ainsi qu'il est dit dans le texte.

canard